Cass. 2ème Civ. 5.02.2022 Pourvoi n° 20-17.123 FS-B – Jurisdata n° 2022-008296

Faits de l’espèce : un mineur court sur le toit d’un entrepôt et chute en passant sur une plaque de fibrociment qui se brise sous son poids et se blesse. Ses civilement responsables viennent rechercher la responsabilité du propriétaire de l’entrepôt, en sa qualité de gardien du toit, sur le fondement de la responsabilité du fait des choses que l’on a sous sa garde telle que prévue par l’article 1242 alinéa 1 du code civil.

Pour retenir le rôle causal d’une chose inerte dans la production du dommage, la démonstration de la seule implication de la chose ne suffit pas : il faut encore démontrer une anomalie de position ou d’état pour établir que la chose a été l’instrument du dommage.

Les juges du fond avaient tranché en faveur d’un partage de responsabilité par moitié à la charge du gardien, retenant que la plaque de fibrociment qui avait cédé était dans un état « moyen voire vétuste », voire même partiellement fissurée, et que le mauvais entretien des plaques de fibrociment équipant le toit établissait le rôle actif de la chose dans la production du dommage.

Dans un arrêt en date du 5 mai 2022, la 2ème chambre civile de la Cour de Cassation casse l’arrêt rendu par la Cour d’Appel de DOUAI qu’elle censure aux motifs qu’ « en se fondant exclusivement sur le défaut d’entretien de la plaque de fibrociment pour retenir son rôle actif dans la survenance du dommage, sans mettre en évidence l’anomalie de cette chose, en recherchant si la plaque, même correctement entretenue, n’aurait pas cédé sous le poids de la victime, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ».

Les plaques de fibrociment ne sont pas destinées par nature à servir de support au passage. Ainsi, et sauf à établir que même parfaitement entretenue, une plaque de fibrociment ne se serait pas brisée sous le poids d’un homme, fut-il mineur, l’exonération de responsabilité du gardien doit être totale puisque la chose n’a pu jouer qu’un rôle passif, seul le comportement fautif de la victime se trouvant alors être la cause exclusive du dommage.

Il semble donc que la Cour de Cassation introduise plus d’objectivité dans l’appréciation de l’anormalité de la chose inerte, à moins qu’il ne s’agisse d’une plus grande sévérité au stade de l’appréciation de la faute commise par la victime…

Les brèves de jurisprudence de Me Astrid MAFFRE-BAUGÉ